M Le Monde magazine, octobre 2014
propos recueillis par Ide Parenty
Cyrille Weiner photographie beaucoup l’architecture. Mais lui qui s’intéresse souvent aux usages et à l’appropriation des lieux,s’est trouvé, cette fois, face à des locaux inoccupés. Pour M Le magazine du Monde, Cyrille Weiner a, en effet, tiré le portrait de la fondation Louis-Vuitton, avant son ouverture au public le 27 octobre prochain. Le photographe – qui a notamment travaillé sur les extérieurs du musée du Quai Branly, le Pôle international de la préhistoire (Dordogne) et qui collabore régulièrement avec l’architecte et scénographe Patrick Bouchain – livre ainsi en exclusivité le premier reportage diffusé en France du monument consacré à l’art contemporain. Une œuvre de Frank Gehry, auteur, notamment, du musée Guggenheim de Bilbao.
« Un objet organique, vivant et changeant »
Lorsque Cyrille Weiner s’empare du sujet, en cette toute fin du mois d’août, ni les œuvres ni les visiteurs n’ont encore investi les lieux. « Je me suis donc plutôt penché sur l’inscription des lieux dans le site, comment celui-ci peut dialoguer avec l’existant. » Le batiment construit le long du Jardin d’acclimatation surgit des arbres du bois de Boulogne. « Ce qui m’intéressait, c’était de montrer le bâtiment dans son contexte, dans son rapport au bois, au végétal, là où la nature est omniprésente. »
Le photographe a donc cherché à capter des ambiances, dans une approche qu’il qualifie lui-même d’« atmosphérique ». « Le bâtiment réagit à la lumière. C’est un objet organique, vivant et changeant, avec des propositions nouvelles à chaque instant. » Mais, en ces jours de rentrée, le ciel est très capricieux, oscillant du très gris au très lumineux. « J’aurais aimé avoir une palette de météo bien plus large, mais j’ai finalement décidé de jouer avec les variations de la journée. »
« Il est impressionnat tout en restant abordable, humain »
Il met ainsi en lumière les formes de ce bâtiment qui lui inspire aussi un sentiment très futuriste : « Il y a ces poutres courbées, le jeu des matériaux qui laisse apparaître la charpente, cette alliance étonnante entre le bois et le verre. Et puis il y a aussi la courbe et l’oblique, présents en permanence. » Quant à l’intérieur, il est « un écrin » : un espace « dédié aux œuvres » qui abrite au total 11 salles d’exposition, une salle de concert, une librairie, un restaurant et trois terrasses avec vues inédites sur Paris.
Pourtant rien ici de démesuré : « J’aime l’échelle du lieu. Il apparaît, puis disparaît. Il s’efface dans la nature. Quand on se recule, il est complètement caché, puis quand on s’approche, il se donne complètement. Il est impressionnant tout en restant abordable, humain. » Et c’est d’ailleurs comme tel que Cyrille Weiner l’a photographié : « J’ai fait cette série comme je ferais le portrait d’une personne. Avec ses humeurs et ses expressions. »